Évaluation de l’effet de la couleur de la tubulure sur la récolte de la sève d’érable – les résultats
Une collaboration entre le Centre ACER et Les équipements d’érablière CDL
Dans le précédent numéro de La technique CDL du printemps dernier, nous avions présenté ce projet de recherche sur la couleur de la tubulure, une collaboration entre le Centre ACER et Les équipements d’érablière CDL. À l’époque, le projet était en cours et les résultats n’étaient pas encore connus. Aujourd’hui, nous sommes en mesure de vous présenter les principaux résultats de cette recherche et d’aborder les enjeux entourant la couleur de la tubulure pour la récolte de la sève.
La couleur de la tubulure retient l’attention des acériculteurs depuis un certain nombre d’années. À la base, cet intérêt tient au fait qu’un matériau de couleur foncée absorbe mieux le rayonnement du soleil et chauffe plus rapidement qu’un matériau clair. L’utilisation d’un matériau foncé pourrait donc favoriser le dégel de la tubulure et permettrai d’être en opération plus tôt dans la même journée. En contrepartie, ceci pourrait aussi favoriser la croissance microbienne dans la sève en cours de saison et la dégradation qui s’en suit. Un impact de la couleur de la tubulure était donc pressenti sur les volumes de récolte et la qualité de la sève. Des études similaires avaient été effectuées par le passé sur la couleur des chalumeaux seulement, mais elles n’ont pas été en mesure de montrer d’effet sur le volume de sève récolté. La question restait donc ouverte sur l’effet de la couleur de la tubulure sur la coulée de la sève et sa qualité. Afin d’apporter quelques éléments de réponse, un projet a été mis en place à l’érablière expérimentale du Centre ACER. Ce projet visait principalement, à comparer deux tubulures identiques, mais de couleurs différentes, une bleue (claire) et l’autre grise (foncée)(shadow) (Fig. 1).
Fig. 1 – Dispositif d’entaillage apparié sur les mêmes arbres, utilisé pour comparer la tubulure bleue (claire) à la tubulure grise (foncée)
Dans ce projet, un dispositif expérimental rigoureusement contrôlé était utilisé pour comparer les deux types de tubulure. Par exemple, l’entaillage était pratiqué de façon appariée sur les mêmes arbres pour les 2 types de tubulure et en considérant un nombre de répétitions suffisantes pour minimiser l’effet d’autres variables sur la coulée qui pourraient venir fausser l’expérience. De plus, le dispositif était muni de capteurs de vacuum et de température extérieure, pour la tubulure et la sève, de même que de compteurs calibrés pour mesurer les volumes de sève récoltés quotidiennement. Pour compléter, un plan d’échantillonnage de la sève a été mis en place afin de suivre sa qualité en cours de saison.
De manière générale, la saison des sucres à l’érablière a été relativement courte en 2021 avec des températures extérieures plutôt élevées pour la saison. Néanmoins, les mesures en continu de la température des tubulures bleues et grises à différents endroits des systèmes ont permis de montrer que la tubulure grise avait tendance à atteindre des températures plus élevées que la tubulure bleue. En moyenne, la tubulure grise atteignait une température maximale durant la journée plus élevée de 1.3 °C que la tubulure bleue (Fig. 2).
Fig. 2 – Résultats sur la mesure de la température maximale quotidienne moyenne de surface à différents endroits de la tubulure. Les lettres différentes sur les moyennes indiquent une différence significative, p < 0.05.
Cet effet sur la température de la tubulure n’a par contre pas eu de répercussion significative sur la température de la sève. En effet, la température maximale quotidienne de la sève récoltée avec la tubulure bleue était comparable en moyenne à celle de la tubulure grise (Fig. 3).
Fig. 3 – Résultats sur la mesure de la température maximale quotidienne moyenne de la sève à l’extracteur pour les différents systèmes. Les lettres différentes sur les moyennes indiquent une différence significative, p < 0.05.
Un résultat comparable à celui pour la température de la sève a été obtenu cette fois-ci pour la coulée. En effet, les volumes de sève récoltée des deux types de tubulure étaient comparables avec en moyenne, environ 105 L de sève par entaille récoltée pour les deux types de tubulures (Fig. 4). Pour ce qui est de la qualité de la sève récoltée, les différentes mesures de la contamination microbienne de la sève à différentes périodes de la saison de même que l’analyse des sucres n’ont pas permis de montrer de différences entre les 2 types de tubulure. De manière générale, pour les deux types de tubulure, la sève était peu contaminée et sans dégradation apparente des sucres.
Fig. 4 – Résultats sur la mesure du volume de sève récoltée pour les différents systèmes munis des tubulures bleues et grises. Les lettres différentes sur les moyennes indiquent une différence significative,
p < 0.05.
En somme, les résultats de cette recherche n’ont pas montré d’effet de la couleur de la tubulure sur les volumes de sève récoltée ni sur la dégradation microbienne de celle-ci, bien qu’une augmentation significative de la température maximale moyenne des surfaces ait été mesurée pour la tubulure grise. Précisons que ces résultats se rapportent aux conditions particulières de l’étude, soit, les caractéristiques propres à l’érablière expérimentale du Centre ACER (érablière avec peu de pente et un dhp moyen relativement élevé), une saison 2021 caractérisée par des températures extérieures relativement élevées et une période de coulée relativement courte et le fait que la tubulure était neuve. Des résultats différents pourraient donc être observés dans des conditions significativement différentes de celles étudiées. L’utilisation de tubulures de couleurs différentes pourrait par ailleurs être utile pour distinguer des secteurs de production dans l’érablière sans pour autant influencer de façon notable la récolte et les caractéristiques de la sève pour des conditions comparables à celles de la présente étude.